Le système de la Nam Dôn
Le système de la Nam Dôn
Historique des explorations
En 1996, une expédition conduite par Claude Mouret s’intéresse au poljé de Ban Vieng (12 km au NE de B. Na). Au sud du poljé, deux grosses pertes, l’une pérenne (Tham Kagnung) et l’autre temporaire (Tham Houay Sai perte) y sont partiellement explorées. La destination des eaux de ces pertes doit se trouver plus au sud, dans la direction du gradient hydraulique régional imposé par l’altitude du Mékong. Cette hypothèse est publiée par CM et François Brouquisse dans le rapport d’activité CREI 1994-1996.
Un an plus tard, lors d'un raid d’une journée à la fin de l’expédition 97, les deux comparses repèrent, sur la bordure sud du karst, la source (khoun) de la Nam Dôn et une grotte (tham) associée (Tham Khoun Dôn), ainsi qu'une grosse émergence temporaire (T. Houay Sai) en peu plus à l'est. Les deux cavités sont parcourues et topographiées sur quelques dizaines de mètres par le duo CM-FB. Le rapport CREI 97 qui relate cette "découverte" sera à nouveau co-signé par CM et FB.
L'exploration commence réellement lors de l'expédition 1998. F. Brouquisse, secondé par J-F Vacquié et accompagné de Khamsone Khamlasi, lève en trois jours la topographie de T. Khoun Dôn sur 3.3 km. Le trio parvient jusqu'à une très grande salle, baptisée plus tard salle Khamsone, au sud de laquelle la jonction est établie avec la seconde équipe topo emmenée par CM, entrée par Tham Houay Sai. La Grande Boucle ainsi formée constitue l'ossature initiale du système de la Nam Dôn. Nous n'avons pas eu accès aux relevés de CM et nous ne connaissons pas l'étendue précise de sa contribution. Néanmoins celle-ci peut être évaluée à environ 1.5 km à partir de bribes d’informations publiées dans Spelunca n°71 en 1998, et de la topographie publiée en format réduit en 2001 dans Spelunca n°84 (ci-dessous). Ce sera la dernière expédition commune de FB et CM, car l’équipe se décompose une première fois.
Toujours en 1998, une équipe indépendante de plongeurs (F. Auber, F. Bréhier, A. Espinasse, D. Sablé) explore la résurgence de la Nam Dôn sur environ 270 m. Un premier siphon est franchi (120 m, -10) et après un lac de 90 m de long, un second siphon (50 m,-23) est exploré, avec arrêt à -11 sur galerie remontante.
Trois à quatre cent mètres seront ajoutés par l’équipe CM en 2000, dans le prolongement d'une grosse galerie à l'est de la grande salle. Cette extension n’a malheureusement pas été raccordée sur la bonne galerie.
Topographies connues du système de la Nam Dôn : à gauche, Brouquisse et Vacquié, 1998 ; à droite Mouret et col., Spelunca, 2001.
Les explorations de 2005 et 2006
Il faut ensuite attendre cinq années avant que l'équipe Mouret retrouve TKDHS. En 2005, la topographie du Labyrinthe est entreprise. Elle est assurée par Bernard Giai-Checa & col. d'une part, et par Charles Ghommidh & col. d'autre part. Vers l'est, la Galerie des Chèvres est remontée jusqu'à deux sorties : un large aven, l’aven des Chèvres, et une étroite ouverture latérale, la Porte du Gypse. Vers l'ouest, CM et JFV accèdent à des sorties latérales peuplées de ruches sauvages, qui évoquent la légende locale de la Roche au Miel.
En 2006, une grosse équipe est constituée. Le réseau est investi par quatorze spéléos (dont quatre plongeurs), toujours sous la conduite de C. Mouret. Au fond de T. Khoun Dôn, Florence Guillot et Maria Madrid explorent un réseau ennoyé qui shunte une partie de la Grande Boucle. Une grosse galerie, parallèle au parcours principal, est également topographiée. Une avancée majeure est réalisée lorsque C. Ghommidh et Helmut Steiner découvrent la branche Est, au-delà d'un itinéraire labyrinthique peu évident. En quatre séances, ils explorent et topographient plusieurs kilomètres de galeries, ouvrant un boulevard en direction des pertes du poljé de Ban Vieng explorées depuis 1996. Le point le plus extrême est atteint à la nage par Flo Guillot, mais la progression est arrêtée par un siphon.
Quelques mois plus tard, à la suite de rumeurs malsaines propagées par Claude Mouret, Flo Guillot et Phil Bence quittent l’équipe, qui se désagrège pour la seconde fois.
En février 2007, H. Steiner et J-F. Vacquié font une brève incursion dans le système, le jour précédant l'expédition Xé Bang Fai 2007.
Le siphon temporaire de Tham Houay Sai (fin d’explo 2006), shunté en février 2011 (© Phil Bence - explo.fr)
Les explorations récentes
En 2010, après une troisième dispersion de l’équipe Mouret à l’issue de la lamentable expédition de 2009, CM et JFV, maintenant seuls, entreprennent la re-topographie du labyrinthe, ce qui n’apporte rien à la connaissance de la cavité. Bizarrement, la Branche Est, de loin la partie la plus intéressante du réseau, est laissée de coté. Trop loin ? Itinéraire perdu ?
En 2011, l'équipe Laos 2011, emmenée par François Brouquisse, Charles Ghommidh et Flo Guillot, étend la topographie à 21 km. Les raccords sont réalisés pour positionner les bouts de topo éparpillés depuis 2005 ; un vaste étage inférieur est découvert sous le labyrinthe ; le parcours de la rivière temporaire de Tham Houay Sai est identifié et suivi sur près de deux kilomètres de nouveaux conduits, au-delà d'une nouvelle grande salle ; la branche Est est prolongée jusqu'à une sortie dans une doline perdue au coeur du karst (Kouan Pheung - la Doline des Abeilles) et poursuivie sur le flanc opposé dans Tham Pheung, jusqu’à une nouvelle doline.
La sortie dans la doline de Khouan Pheung, en février 2011 (© Phil Bence - explo.fr)
Quelques semaines plus tard, guidés cette fois par le balisage mis en place, CM et JFV revisitent les galeries de 2005 et les nouveaux réseaux de 2011 et publient précipitamment leurs "découvertes" dans Spelunca n°122, en “oubliant” malencontreusement de préciser qu’ils n’en étaient pas les premiers explorateurs.
En février 2012, l’équipe Khammouane 2012 (K12) porte le développement total du système à plus de 27 km en étendant le réseau vers l’Est dans Tham Kouan Kaohong, une nouvelle cavité dans laquelle la rivière de Tham Houay Saï est retrouvée.
En 2013, des escalades permettent d’étendre le réseau vers l’Est, la topographie du Labyrinthe est poursuivie, le développement du réseau atteint 33 km.
En 2014, une nouvelle cavité, Tham Phe Pha Thon Maï, découverte par deux participants appartenant au Radeau des Cimes, est ajoutée au système. Le réseau du Youki est découvert. Tham Khoun Dôn atteint 37 km et devient la troisième grande grotte d’Asie du Sud-Est.
En 2015, la topographie du Labyrinthe est étendue dans les Hauts de Houay Saï, et une nouvelle entrée est ajoutée au réseau. Le niveau très bas des eaux permet l’exploration de 500 m de galeries, habituellement noyées, dans le prolongement de la Rivière de Pierre. Une partie du chaînon manquant entre le Grand Canal de T. Kaohong et celui de T. Houay Saï est découverte, à l’endroit prévu par la “théorie“. T. Phe Pha Thon Maï est prolongée de quelques dizaines de mètres jusqu’à une nouvelle entrée, loin dans le karst. Dans T. Kaohong, une désobstruction est entamée, face au vent, au fond du minuscule Réseau Bleu. Le développement du système atteint 42 km.
En 2016, nos partenaires plongeurs d’Expé-Laos s’intéressent aux siphons que parcourent les bouts de rivières déjà explorés. A Tham Khoun Don, la pénétration en plongée de la résurgence commence. A l’est de T. Houay Saï, le siphon qui limitait le développement du réseau est franchi, et le contact est «établi» avec T. Kouan Pheun. Mais le fait qui est à cet endroit là le plus important est l’exploration d’un beau siphon qui donne accès à la grosse rivière quittée en 2012 à l’aval de T. Kaohong. Il reste encore environ 200 m.
Le développement du système atteint 44 km.
Secteurs topographiés par l’équipe d’Explo-Laos : historique de la progression