Tham Kathoung
par Eric Ardourel
Tham Kathoung s’ouvre non loin de Ban Nahin, gros village établi à l’entrée de la moyenne vallée de la Nam Hin Boun, à l’exutoire des eaux de la centrale hydroélectrique du barrage de Nam Theun I, sur l’itinéraire d’accès à Tham Konglor.
Coordonnées :
48Q - 448512 -2005608 Alt. 196 m
Carte topographique au 1/50000 : Ban Na Hin
Toutes les cartes peuvent être trouvées ici
L’entrée sud de Tham Kathoung © P. Crochet - 2013
Historique
Découverte en décembre 2012 par un paysan qui défrichait un coin de terrain au pied d’un escarpement calcaire. Visitée rapidement sur quelques centaines de mètres, la grotte semble traverser la montagne. Rapidement identifiée par les autorités provinciales comme potentiellement intéressante pour le tourisme, l’ATL de Thakhek nous demande d’en poursuivre l’exploration et d’en évaluer l’intérêt pour des projets éventuels de développement. Nous décidons d’aménager le planning de l’expédition K13 pour jeter un coup d’oeil sur la grotte. Les 2 et 3 mars 2013, notre équipe investit la cavité et lève 3300 m de topographie, dont la moitié en première... Il est des missions moins enthousiasmantes !
Description
La trémie d’entrée de T. Kathoung. Gare aux petites bêtes © E. Ardourel - 2013
Sak, notre guide, premier explorateur de Tham Kathoung. © E. Ardourel - 2013
De porche en porche
Le cake napolitain de T. Kathoung © P. Crochet - 2013
Paysage stalagmitique dans T. Kathoung © P. Crochet - 2013
Délice gastronomique lao : oeufs de fourmis © E. Ardourel - 2013
Bilan de la journée : 1.8 km topographiés en 6 heures d’exploration.
Le lendemain, retour à Tham Kathoung. Une équipe photo pour couvrir les découvertes de la veille et une équipe de trois pour aller voir du côté de la vasque perchée. Nous arrivons à passer sur la paroi gauche de la vasque en escalade libre, puis nous franchissons les rebords successifs de quelques autres vasques à sec. Un courant d’air : il s’agit bien d’une galerie amont ! Nouvel obstacle : le sol devient un véritable tsyngi dont les lames verticales font deux mètres de haut. L’obstacle n’est pas long, mais il est dangereux. Nous passons un à un, debouts, marchant en funambules sur les arêtes acérées en espérant qu’elles ne cassent pas sous notre poids. Décidément, cette branche est plus sportive que celle de la veille. Heureusement, cela ne dure pas, et nous arrivons dans une galerie au sol un peu moins tourmenté. Toujours des micro-marmites à pointes - caractéristiques du Khammouane - mais on avance plus vite. L'air est dans notre pif. Du gros volume : c'est la Cocalière en x 2. Quelques belles coulées monumentales, mais plutôt rares. Le niveau de crue, bien visible en noir, n'épargne que quelques cloches d'air en plafond à 13 m de haut... Je ne veux même pas imaginer être pris dans ce bouillon. Devant, la galerie austère s'enfonce plein nord dans le karst. Tout est piègeux : les prises de main ne tiennent pas souvent, certaines lames horizontales au sol s'écroulent dès qu'on marche dessus. 23 visées laser plus loin, une grande pente de sable très abrupte nous amène vers un siphon… non ! Il y a un passage en voute mouillante ! Notre compère suédois se lance en premier : 20 m de nage, passage de la voute sous laquelle l'air turbine, et un cri de joie de type nordique m'indique qu'il prend pied au sec. La galerie continue ! Nous continuerons à deux. Je m’immerge dans le siphon lugubre et le rejoins. A l’étroit de la voûte, le vent me projette des vaguelettes à la figure – cela me rappelle les baignades en méditerranée par temps de mistral. Ensuite, le décor change : aux lames acérées se substituent d'abord des petits galets, puis du sable : on avance donc plus vite. D'autant plus que la galerie s'agrandit : 30 m de large pour 16 m de haut ! Je me souviens ce que disaient certains vétérans du Laos à propos d’autres cavités : “Rien qu'en traversant la galerie d'une paroi à l'autre, j'aurai fait plus de première qu'en une année en France !”. Je confirme. Malgré quelques virages, on fait désormais des visées moyennes de 50 m... Visée record de 85 m, et encore, parce que le distoX n'arrivait plus à prendre la mesure, sinon, on aurait pu tirer à 120 m. C'est désormais des volumes dignes de Saint Marcel-d’Ardèche. A partir de là, des concrétions sur les banquettes de la rivière à sec : colonnes, piliers, coulées. Plus on avance, plus le volume prend de l’ampleur. On laisse des départs à droite, à gauche. Le temps passe et nous risquons de nous mettre en retard pour le rendez-vous de sortie avec l’autre équipe. Je décide de pousser un peu afin de reconnaître un obstacle éventuel pour la prochaine pointe. Je gravis une dune de sable et du sommet je vois, hélas, l’obstacle ultime du speleus vulgaris que je suis : un énorme siphon ! Je tente une photo, mais l’immensité des lieux et du lac absorbe toute la lumière de mon misérable flash. Plus le temps de fouiner, on va vraiment être en retard pour la sortie ; on part donc en petites foulées avec pour objectif de parcourir les 1.4 km de galerie en un temps record. Après dix minutes de course de fond dans le sable, nous nous rendons compte que nous tournons en rond ! Avons-nous emprunté une galerie inconnue ? Ou avons-nous réussi l’exploit de faire demi-tour dans la galerie sans même nous en apercevoir ? Mon acolyte en doute. Le mystère devra être levé une autre fois.
Finalement, nous rejoignons le point de rendez-vous à travers des jardins de bananiers et d'ananas.
Bilan de la journée : 49 visées, pour 1.4 km de topographie, ce qui amène Tham Kathoung à 3.4 km de développement. A suivre ?
Topographie